Nous dirigeons-nous vers une économie virtuelle?

Nous dirigeons-nous vers une économie virtuelle?

Pourquoi parler d’une économie virtuelle?

L’économie virtuelle, c’est la dématérialisation des interactions économiques normales de notre société au profit d’activités virtuelles. La présence humaine physique est remplacé par un contact par l’intermédiaire des technologies virtuelles audio, vidéo, conférence web, streaming et autre.

Ce fameux virus qui chamboule nos habitudes

La propagation de la COVID-19 a des impacts profonds sur notre société et notre façon d’interagir avec les autres. Les efforts visant à limiter rapidement la propagation du virus auront-ils de impacts à long-term? Nos habitudes de consommation et d’interaction risquent-ils d’être chamboulés pour des années à venir?

Déjà, les consommateurs fuient les lieux publics. Les rassemblements sont annulés, les écoles sont fermées, les centres commerciaux se vident (et sont vidés de leur contenu) et les entreprises exigent le télétravail. On ne peut même plus visiter Mamie le dimanche de crainte de l’infecter. Évidemment, la situation est temporaire. Pour quelques mois nous dit-on.

Mais quel sera l’impact à long-terme sur nos vies si nous devions fuir le contact les autres durant des mois? N’assistera-t-on pas alors à l’effritement de ce qu’il reste de l’économie analogique. Une économie où le contact de personne à personne était hier encore le mode de commerce dominant?

L’économie virtuelle : Au-delà de la transformation numérique

Dans un tel contexte, il ne sera plus simplement question de transformation numérique. On parle plutôt de virtualisation de l’économie. Une économie virtuelle ne serait plus basée sur l’interaction physique entre les gens. Ce serait plutôt sur des interactions où les technologies joueront le rôle d’interface social et économique entre les gens.

Il n’est pas exagéré de croire que dans les prochains mois, l’économie se transforme. Le commerce traditionnel des boutiques, des grandes surfaces et des centres commerciaux devra inévitablement faire place à des système plus ou moins sophistiqués de commerce virtuel.

Rapidement, nous avons constaté à quel point l’isolement pèse lourd sur nous. Le contact humain nous manque. Créatures sociales que sont les humaines nous cherchons par tous les moyens d’être en relation avec nos proches. Certains l’ont déjà compris en ajoutant à la dimension numérique un couche de contact humain.

De commerce électronique à commerce virtuel

Plus que du commerce en ligne, ils permettront aux gens non seulement d’acheter, mais d’interagir avec des conseillers. De se faire présenter les choix pertinents. Et peut-être même d’essayer virtuellement ses achats.

Le commerce électronique ne sera plus un canal parmi tant d’autres. Il s’agira plutôt du seul canal privilégié pour rejoindre les consommateurs. Les entreprises qui ont déjà maîtrisé l’art du commerce électronique sont peu nombreuses ici au Québec et ailleurs au pays.

Il faut plus qu’un site Web transactionnel pour bâtir et maintenir des relations avec ses clients à distance. Il faut maîtriser l’ensemble du processus relationnel. Le marketing par courriel, l’automatisation marketing, les médias sociaux, le SMS et autres technologies marketing devront être mis à contribution pour véritablement accompagner les clients le long de leur parcours d’achat.

Au Québec en particulier, les commerces partent de loin en ce qui concerne le marketing relationnel. Nombreuses sont les entreprises qui opèrent toujours selon de vieux modèles d’attractivité de la marque, sans se soucier vraiment de l’approche orientée client. Ce narcissisme commercial explique pourquoi nous sommes particulièrement vulnérables face aux géants mondiaux du commerce en ligne comme Amazon.

Par ailleurs, les entreprises devront prendre des mesures pour rassurer les gens face à leurs mesures d’hygiène et à l’absence de contamination des marchandises proposées. Et en cas de retour de marchandises, comment les commerçants assureront la salubrité des marchandises qui auront circulé librement dans la population?

Les défis de la cohésion d’équipes virtuelles

Dans l’économie virtuelle, les entreprises se tournent en permanence vers le télétravail. Il sera essentiel de prendre rapidement des mesures pour assurer la cohésion d’équipe et la mobilisation des employés. Les entreprises qui embauchent déjà du personnel à l’étranger savent à quel point il est difficile d’assurer cette mobilisation. Et la période d’incertitude économique qui suivra cette crise sanitaire ne fera qu’amplifier l’insécurité des gens qui se trouveront isolés à la maison.

Magali Legault, experte en transformation organisationnelle et en mobilisation d’équipes vient d’ailleurs de publier un excellent billet sur le sujet.

L’enseignement à distance deviendrait enseignement virtuel

L’économie virtuelle aura des conséquences profondes pour le milieu de l’enseignent. Ce monde, pourtant conservateur et lent à évoluer sera également bouleversé. Cette transformation touchera tous les niveaux, de la maternelle aux études supérieures. Déjà, l’interruption temporaire de l’enseignement fait réfléchir sur ce que sera la salle de classe de demain.

Même si déjà certains établissements offrent de la formation à distance, peu sont en mesure d’offrir une formation complète pour un programme de premier cycle universitaire. L’université de Montréal vient de publier un Guide de l’étudiant à distance. Et le Doyen de la Faculté d’éducation permanente Christian Blanchette dans un billet récent explique que le milieu universitaire doit migrer très rapidement vers l’enseignement en ligne.

Par ailleurs, on sait que l’interaction et l’animation des discussions entre les étudiants fait partie de l’apprentissage. Comment peut-on stimuler la réflexion et l’intégration de la matière en mode purement virtuel?

Nos établissements, déjà sous-financés et en mal de ressources, devront se transformer pour offrir de véritables salles de classe virtuelles. Ces salles  virtuelles seront animées à distance par des enseignants formés non seulement à la matière, mais aussi aux techniques de formation virtuelle. Il s’agira de salles de classe dématérialisée où les étudiants continueront d’apprendre, en contact avec les autres, mais sans présence physique.

L’émergence d’équipes des ventes virtuelles

Conséquence de l’économie virtuelle où le télétravail domine, la vente aussi se dématérialise. Parce que personne ne veut recevoir un représentant dans sa maison – et aucun vendeur n’y viendrait non plus. Mais aussi parce que « aller prendre un café » pourrait devenir une activité à risque.

Les entreprises qui vont tirer leur épingle du jeu seront celles qui sauront mettre en place un processus de vente virtualisé. La maîtrise des plateformes d’automatisation, de CRM et de présentation virtuelle sera-t-elle la clé de survie des entreprises B2B? Par contre, le Québec accuse un retard important dans l’adoption de ces technologies pourtant très performantes.

Pour les vendeurs qui travaillent de la maison, un petit conseil: en vidéoconférence, soignez votre arrière plan. Si vous travaillez dans un endroit encombré, soyez conscients que vos clients voient tout autour de vous.

Événements virtuels

Le secteur des réunions et congrès est déjà durement touché.  Les rassemblements sont limités et les gens fuient les lieux publics. Source de revenu incontournable pour le secteur associatif, les congrès et activités de formation devront se virtualiser pour assurer leur pérennité.

Récemment, certains événement ont offert une participation virtuelle par le biais de streaming vidéo. Mais la qualité de l’expérience laisse souvent à désirer. Les défis sont tant sur la qualité du son et de l’image que de la qualité du contenu présenté. La bienséance et la pression sociale nous empêchent de quitter une salle physique en plein milieu d’une conférence. Mais il est tellement plus facile de décrocher d’un discours ennuyeux lorsqu’on est devant son ordinateur.

Les organisateurs d’événements devront mieux maîtriser la dimension des technologies de diffusion. Mais par dessous tout, ils devront rehausser de façon importante la qualité du contenu présenté. Et cela inclut les habiletés de présentation des conférenciers.

Par où commencer pour amorcer le virage vers la virtualisation?

Ne vous ruez sur la première technologie qui vous tombe sous la main. Il est essentiel de bien comprendre l’expérience virtuelle à travers les yeux du client. Posez-vous les questions essentielles sur le besoin réel de vos clients. Voyez ce besoin de leur point de vue, et non selon le regard biaisé de votre marque qui cherche coûte que coûte à vendre des trucs.

  • Quelles sont les forces de l’expérience actuelle – quelle sera la contrepartie virtuelle?
  • Qu’est-ce qu’on peut faire de mieux – qu’est-ce qu’on peut éliminer
  • Quels sont les freins des clients, des partenaires, des équipes de travail?
  • Quelle est la façon idéale d’éliminer ces freins et de favoriser l’achat, la formation, le divertissement, etc.

Comprenez bien le parcours client et ses composantes. Penchez-vous particulièrement sur la dimension de la confiance, qui aura été mise à rude épreuve dans le contexte actuel. Dans un monde davantage virtualisé, la quantité de données à votre disposition explosera. Que ferez-vous pour en tirer parti et pour mieux comprendre vos clients, adapter votre message et le rendre plus pertinent.

Pour démarrer le processus, organisez un collaboratoire virtuel avec votre équipe de direction afin de jeter les bases d’un plan de redressement qui permettra de transiter rapidement vers une expérience client davantage virtuelle. En ce faisant, vous aurez un canevas de travail pour assurer la pérennité de votre entreprise dans un monde ou les réflexes organisationnels ne tiennent plus la route.

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